[REPOST] La pire semaine de l'histoire boursière
Qui veut comprendre le futur doit comprendre le passé
Après la première guerre mondiale, l’Europe est dévastée. De l’autre côté de l’Atlantique, les États-Unis se portent à merveille, du moins, jusqu’à ce fameux “jeudi noir” le 24 octobre 1929, qui marquera le début du krach le plus important de l’histoire boursière.
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Comme d’habitude, commençons par poser le contexte. Le krach intervient à la fin des “années folles”, période mythique ou l’économie est dopée : nous avons des pays à reconstruire !
La consommation bat son plein, et les marchés boursiers également ! De 1921 à 1929, le Dow Jones, indice mythique américain, passe de 63 points à 380. Une hausse impressionnante de 493%.
Le secteur automobile et celui de la construction ont connu une croissance exceptionnelle. Un des éléments clés à prendre en compte dans cette période est l’étalon or, qui est encore effectif. Nous avons parlé de l’étalon or dans l’article suivant :
Pour revenir rapidement sur le principe, les billets de banque et les pièces sont convertibles en or à un taux fixe. Cela signifie que chaque unité de monnaie est soutenue par une certaine quantité d'or. Le but étant de garantir la stabilité de la valeur de la monnaie en la liant à l'or, qui a une valeur intrinsèque.
La FED, fraîchement crée (en 1913), neutralise ses achats d’or afin de contrôler la quantité d’or qui était achetée à l’étranger. L’objectif ici est de contrôler la quantité d’or importée et exporté dans le pays, ce qui a un impact sur la quantité de monnaie pouvant être émise.
En contrôlant la quantité d’or et par extension la quantité de monnaie en circulation, la FED a pu contrôler l’inflation.
Mais l’ère du crédit facile a rendu les citoyens un peu trop gourmands, et vous le savez probablement, la cupidité est un mauvais défaut sur les marchés financiers. Les “calls loans” sont devenus une norme, concrètement les calls loans sont équivalents à ce qu’on appellerait “l’effet de levier”. Les investisseurs n’avaient qu’à déposer 10% de la somme nécessaire à l’achat de titres.
L’effet de levier est alors de x10, quand le marché monte inlassablement sur une décennie, tout va bien, mais quand il commence à se replier, les ennuis commencent…
En 1928, la FED décide que la spéculation à outrance était terminée, et qu’il fallait freiner la spéculation. Elle a donc décidé d’augmenter ses taux directeurs :
Mais, il y a un problème, les taux d'intérêt plus élevés ont rendu les prêts des courtiers plus attractifs pour les banques. Les banques pouvaient emprunter de l'argent à la Fed à un taux d'intérêt plus bas, puis prêter cet argent aux investisseurs à un taux d'intérêt plus élevé, réalisant ainsi un profit.
Au lieu de freiner la spéculation, la décision de la Fed a en fait augmenté la quantité d'argent disponible pour les investisseurs pour acheter des actions, ce qui a encore alimenté la spéculation et l'augmentation des prix des actions.
Et ce n’est pas le seul problème ! Entre 1921 et 1932, la monnaie varie entre déflation sévère et inflation légère. Que se passe-t-il quand la FED se décide à augmenter les taux à une période ou il n’y à pas d’inflation ? Cela accentue la déflation.
Les trois dernières bougies rouges correspondent aux années 1930, 1931 et 1932, durant cette période la monnaie gagne entre 6 à 10% par an. Quand la monnaie est aussi performante, quel est l'intérêt de l'investissement ?
Le grand krach de 1929 est un exemple frappant de ce qui peut se produire lorsque les anomalies économiques atteignent un niveau insoutenable. Ce krach était l'aboutissement inévitable de la période de prospérité dorée des années 20, des excès de l'ère Gatsby et de la conviction que le monde avait changé et que la richesse et l'emploi illimités étaient la nouvelle normalité. La spéculation, était monnaie courante. Le crédit était libre, facile et incontrôlable. Tout le monde y croyait... jusqu'au moment où ils n'y ont plus cru.
Tout a basculé en octobre 1929. Les chutes intrajournalières n'ont pas battu de records, mais une série de 5 jours noirs a constitué le pire effondrement de l'histoire des marchés boursiers. Tous les gains réalisés après la Première Guerre mondiale ont été effacés.
Cet effondrement a déclenché des années de faillites bancaires et de déclin économique, alors que les faillites et les défaillances d'entreprises se multipliaient aux États-Unis. La production industrielle américaine a baissé de moitié de 1929 à 1932 et le taux de chômage est passé de 3,2 à 24%.
Pour répondre à cette grande dépression, le nouveau président des USA (à partir du 4 mars 1933) décide de réaliser une série de mesures pour relancer l’économie, c’est le “New Deal”.
En 1934, le gouvernement dévalue le dollar de 41%, les produits américains deviennent moins chers, ce qui favorise l'exportation.
Le système bancaire est réorganisé, les banques de dépôt et les banques d'affaires sont séparées. L’épargne est alors mise à l’abri des risques de krach.
Une commission de surveillance de la bourse est créée, afin de limiter la spéculation excessive.
L’agricultural adjustment act viendra en aide aux agriculteurs. Cet ensemble de mesures doit redonner un revenu permettant de vivre décemment aux agriculteurs, touchés de plein fouet par la crise. Les mesures principales sont :
Réduction de la production pour soutenir les prix
Paiements aux agriculteurs qui participaient aux programmes de réduction de la production
Régulation du marché agricole
Taxe sur les transformateurs et distributeurs d’aliments de base afin de financer les mesures précédentes…
Prêts hypothécaires aux agriculteurs en difficulté afin de prévenir les saisies de terres
Le national industrial recovery act viendra en aide aux industries, les principales mesures sont :
Codes de conduite industrielle : Ces codes devaient fixer des normes de travail équitables, des salaires minimaux, des heures de travail limitées et des conditions de travail sécuritaires. Les entreprises qui adhéraient à ces codes recevaient le droit d'afficher le symbole du "Blue Eagle" (Aigle bleu), symbole du programme.
Négociation collective : Le NIRA protégeait le droit des travailleurs à la négociation collective et à la formation de syndicats.
Stimulation de la demande : Le NIRA visait à stimuler la demande économique en autorisant la mise en place de cartels industriels et en encourageant la fixation de prix minimums pour les produits. L'objectif était de maintenir des prix stables et d'augmenter les revenus des entreprises, ce qui devait favoriser la reprise économique.
Programmes de travaux publics : Le NIRA a créé le Public Works Administration (PWA), une agence chargée de financer et de superviser d'importants projets de travaux publics.
Comme nous en avions déjà discuté dans l’article “La stagflation à venir est une bonne nouvelle”, les périodes de crise permettent des avancées écologiques et sociales.
Du côté de l’Europe, le chômage frappera quelques années plus tard.
Le chômage entraîne la précarité, la précarité entraîne le populisme. L'Argentine, le Brésil, l'Équateur, le Guatemala, Panama, le Pérou, le Salvador et le Venezuela sont victimes de coups d'État entre 1930 et 1933.
Puis, la révolution bolchevique, le fascisme italien, la dictature espagnole et la dictature polonaise.
L’Allemagne est dans une situation plus que délicate. Elle doit reconstruire et verser des indemnités de guerre pour payer la reconstruction des pays qu'elle a détruits durant la Première Guerre mondiale, et le chômage fait rage. Il est probable que le krach de 1929 a facilité la prise de pouvoir d’Adolf Hitler.
Comme toujours, si nous parlons d’histoire, c’est pour mettre en parallèle avec la période actuelle.
Le contexte est foncièrement différent, mais nous pouvons y faire quelques parallèles :
Des conditions économiques difficiles : La période économique actuelle est difficile. L'inflation rogne le pouvoir d'achat et les salaires stagnent. Les différents banquiers centraux, pour répondre à cette inflation, augmentent les taux, ce qui empêche les jeunes d’acquérir leur premier bien immobilier.
Les politiques de relances des gouvernements ont creusé les inégalités : Le Quantitative Easing a déversé des milliers de milliards de dollars sur les marchés financiers. La spéculation a favorisé les détenteurs de capital, ce qui a davantage creusé les inégalités.
L’augmentation des inégalités a ravivé le populisme : autour du monde, les citoyens sont de plus en plus enclins à voter pour des extrêmes, nous en avions discuté dans l’article “La démocratie est aussi fragile que la dictature”.
L’augmentation du chômage, le prochain risque : C'est bien l'explosion du chômage (et par extension, l'explosion de la précarité) qui a apporté une visibilité accrue au populisme. Historiquement, quand une politique de hausse des taux a été mise en place, une hausse du chômage a toujours suivi (et un pivot des banquiers centraux également).
Voilà pour l’article du jour ! Il a été particulièrement difficile à écrire étant donné que l'événement a plus de 90 ans, il est plus compliqué de trouver des données sur le sujet. J’espère qu’il vous aura plu.
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On se donne donc rendez-vous mercredi pour le dossier de la semaine.
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